Tome 2, Faim de châtiment
Urban fantasy — Vampires — Italie — 1ère édition avril 2025 — Disponible en broché et numérique sur Amazon.
- Résumé
- Tu l’as lu ?
- Paroles de lecteurs
- Mon petit mot
- Prologue

Résumé
J’étais déjà une chasseuse de vampire vampirisée,
une traîtresse à tout ce qui représentait ma raison de vivre…
Je suis aussi devenue une traîtresse à mes amis.
Il ne reste plus rien des Rouges.
Ou presque…
Après le coup d’éclat des Verts qui ont fait sauter l’église de San Zaccharia – et nous, à l’intérieur – j’ai choisi de rejoindre les rangs de nos ennemis pour détourner leur attention de Lorenzo et de nos quelques compagnons survivants.
Sauf que tout va de travers ! Les chasseurs du Vatican me retrouvent, Lorenzo semble redevenir humain, et César exerce une étrange attraction sur moi. Sans compter que l’Ancien représente une menace pour l’humanité tout entière, puisqu’il veut ramener à la vie le vampire primordial, celui par qui tout a débuté : le Premier.
Cette fois, si je veux rester en vie, je vais devoir découvrir ce que la mort me réserve.

Tu l’as lu ?
Si tu as suivi Lux dans ses aventures vénitiennes pleines de mordant, alors je te serais reconnaissante de laisser ton avis sur la plateforme de vente (Amazon) et/ou sur les sites de lecture que tu préfères (Livraddict, Babelio, Booknode…). D’avance, merci à toi !
Paroles de lecteurs
Quel plaisir de retrouver une Lux toujours aussi survoltée et ses aventures palpitantes ! D’autant plus que le précédent tome nous avait laissé sur un sacré suspense.
M. Eliane
Mon petit mot
Cette duologie, même si je l’ai écrite avec plaisir et bonne humeur (il n’y a qu’à voir la playlist de Lux en fin de chaque tome : c’est ma playlist d’écriture !), aborde aussi des thèmes sérieux tels que l’identité, la quête de soi, la substance de l’âme… Qu’est-ce qui fait de nous ce que nous sommes ? Ce que nous sommes à l’intérieur, ou ce que nous faisons ? Les actes, ou les pensées ? Et si l’humanité redevenait plurielle, comme il y a quelques dizaines de milliers d’années à peine ? En bref, c’est une duologie qui m’a beaucoup parlé, qui m’a touchée, et j’espère que ce sera ton cas aussi.

Prologue – Imprudences
1484.
Un cri d’horreur jaillit dans la nuit romaine.
César me jette aussitôt un regard courroucé, comme s’il me jugeait personnellement responsable de ce qui est en train de se passer.
— Nous arrivons trop tard ! Je te l’avais bien dit, il fallait nous presser…
- Je n’aime pas foncer tête baissée.
- Certes, mais parfois, mon ami, célérité et efficacité valent mieux que tergiversations !
Je pousse un soupir nerveux.
— Attendons de voir ce qui se passe… Je n’ai aucune confiance en l’Ancien.
— Ni moi ! C’est justement pourquoi il faut nous hâter.
Je suis mon ami dans l’étroit escalier, taraudé par l’impression tenace qu’il nous mènera tout droit en Enfer. La chaleur augmente à mesure que nous progressons. Sans doute la torche que tient César est-elle en cause : dans ces souterrains mal ventilés qui s’étendent sous la ville éternelle, la moindre source de chaleur devient rapidement étouffante.
Nous débouchons sur un couloir bas de plafond.
Un autre cri crève l’obscurité, aussi épaisse que du sang coagulé. Un cri plus long. Déjà moins humain que le précédent.
Nous pressons le pas. Une question me tourmente et ne tarde pas à franchir mes lèvres.
— Que ferons-nous si la transformation a déjà eu lieu ?
César hausse les épaules. Le connaissant, je sais que je n’obtiendrai aucune réponse car il n’en a pas à me fournir, tout simplement. César ne parle jamais à tort et à travers. C’est un trait de caractère qui me plaît, chez lui, tout comme sa fougue et sa détermination.
Cette fois, cependant, mon instinct de survie me hurle de ne pas le suivre dans ce souterrain labyrinthique, de tourner les talons pour regagner au plus vite la lumière du jour — qui, pour l’instant, ne nous cause nul désagrément.
En tant que novices, ou « Fils » de l’Ancien, César et moi n’avons pas encore reçu la morsure. Nous sommes promis à entrer dans le cercle des Patriciens, un privilège qui fait notre fierté… Et nous rapproche. L’Ancien ne prend que deux Fils ou Filles à chaque génération. Deux élus, deux jeunes gens issus de l’aristocratie romaine et destinés à être formés par lui avant de recevoir la morsure.
L’Ancien est, comme son nom l’indique, l’un des vampires primordiaux, l’un des premiers des Patriciens à avoir vu le jour. Et, bien évidemment, nous lui faisions entièrement confiance jusqu’à ce jour funeste, quelques semaines auparavant, où notre univers a volé en éclats en quelques secondes.
Le jour où nous avons découvert les plans de l’Ancien, César et moi avons compris que nos vies venaient de prendre un tournant radical. Nous n’aurions jamais dû nous retrouver sous ce pont en pleine nuit, mais nous étions arrivés à Venise dans les bagages de l’Ancien qui devait rencontrer des personnes importantes. Nous étions pleins d’émerveillement, avides d’aventures et d’émotions fortes. César m’avait mis au défi de traverser la lagune à la nage, de canal en canal, et j’ai toujours eu l’esprit joueur… Bref. Nous l’avons fait, nous avons nagé dans les eaux sombres de la Sérénissime, ivres des échos de nos rires contre les façades austères, ivres de notre jeunesse insouciante, et nous nous sommes arrêtés un instant sous un pont, à bout de souffle et de plaisanteries.
Nous nous sommes tus un long moment, adossés à la pierre froide. Et brusquement, les pas se sont approchés. Deux hommes ont eu une entrevue juste au-dessus de nous, sans se douter de notre présence. Une telle coïncidence, c’était tellement improbable ! Ce ne pouvait être que le destin.
César et moi avons gardé le silence, de plus en plus ébahis à mesure que nous comprenions de quoi nous étions les témoins involontaires, de quelle sombre machination nous découvrions les noirs rouages en train de se mettre en branle… Les mots chuchotés coulaient sous le pont comme un poison, et nous avons entendu.
Tout entendu.
L’Ancien voulait en finir avec l’humanité. Ces êtres faibles, méprisables, dominés par leurs émotions, ne méritaient rien d’autre que l’asservissement par ceux qui leur étaient supérieurs en tout : les Patriciens. Et ce n’était pas tout ! Pour arriver à un tel résultat, l’Ancien prévoyait de tirer du Grand Sommeil le tout premier Patricien du monde… Celui qui s’était levé en premier des noirs territoires de la mort, celui qui avait donné naissance à notre espèce en propageant sa nouvelle forme d’existence.
Le Premier.
Rien que son surnom évoquait en nous, jeunes aspirants vampires, les pires abominations. Car l’immortalité a un prix ! Si les Patriciens bénéficiaient longtemps d’une seconde existence nimbée de pouvoir et d’un raisonnement exacerbé, il arrivait toujours un moment où le temps les rattrapait… Nul n’est destiné à traverser les siècles. Un jour ou l’autre, tout Patricien voyait son cerveau se ratatiner, ses instincts bestiaux demeurant aux commandes de son être… Ils devenaient des monstres — et le Premier en était l’exemple typique. Son grand âge le privait apparemment de ses dernières facultés de réflexion tout en lui octroyant une puissance physique hors du commun… La simple idée d’amener un tel cataclysme, quel qu’en soit l’objectif, paraissait totalement folle !
S’il revenait aujourd’hui dans le monde, ce serait une ère de folie, de violence et de massacres. Un triomphe de la démence.
Un nouveau hurlement me tire de mes souvenirs, et cette fois il n’y a plus le moindre doute : la transformation a déjà eu lieu. Nous arrivons trop tard !
Devant moi, César s’est mis à courir. Je l’imite, soudain effrayé par ce que nous allons découvrir au bout de cet interminable couloir…
Le sang coule. À flots.
La femme est en vie, et ne l’est plus.
J’ai déjà vu des humains se faire transformer. Je connais cet état étrange, qui dure de quelques minutes à plusieurs jours selon les individus, cet état transitif pendant lequel le sujet est à la fois biologiquement mort et physiologiquement vivant sans qu’il en prenne conscience. Comme si l’espace-temps se dédoublait, donnant naissance à deux possibilités co-existantes. Une aubaine pour Schrödinger, mais avec un vampire à la place du chat. Le cerveau humain est tellement attaché à la vie qu’il est capable de maintenir des illusions incroyables pour se convaincre que son corps fonctionne encore…
Dans ce cas précis, la victime du sacrifice – car c’en est bien un – harponne mon regard dès mon entrée dans la pièce illuminée de torches, qui projettent de l’or liquide sur les flaques rubis maculant le sol. Elle est attachée à un poteau par des chaînes. Ses jambes ne la portent plus. Des traînées colorées ont été répandues partout ; du sel, du soufre ou bien un quelconque matériau aux propriétés magiques destiné au rituel…
Car l’Ancien est là, le visage masqué de sang et de fureur. On dirait qu’il s’est baigné le visage dans le sang de la femme ; il porte une sorte de toge sombre aux plis compliqués, la même que porte la victime. Ses cheveux sont lâchés sur ses omoplates. Il bouillonne de rage en marchant sur nous.
— Que faites-vous là, tous les deux ?
Aucun de nous ne lui répond. C’est inutile. Notre sort est aussi scellé que celui de la pauvre femme qui pend à son poteau.
— Sortez immédiatement !
Nous ne bougeons pas.
Le Prince des Patriciens hoche la tête, les yeux flamboyants sous la croûte de sang qui macule son front et ses joues.
— Qu’il en soit donc ainsi.
La femme ne me lâche pas des yeux : elle m’appelle à l’aide.
Et je me retrouve figé, incapable de produire le moindre son ou d’esquisser le moindre geste… Ce terrible regard me hantera longtemps, je le sais avec certitude avant même que César ne se jette sur les marques de craie et de sel entourant la nouvelle croqueuse, essayant de les effacer sous les coups énergiques de ses semelles.
D’un revers du bras, l’Ancien l’envoie rouler au sol.
— S’il vous plaît… murmure la femme.
Ses pupilles se sont dilatées, ses crocs déchirent sa lèvre inférieure. Elle est une Patricienne, désormais, mais le Prince ne semble pas envisager de la détacher. Loin de là.
D’un coup sec, il lui ouvre la gorge de part en part. Ce qui ne peut suffire à la tuer, nous le savons tous ! Alors, à quoi joue-t-il ?
— Vous êtes deux idiots, marmonne-t-il en essuyant sa lame contre la toge de sa victime, qui souffre toujours sans pouvoir mourir — pour de bon, cette fois. Pourquoi être venu vous mêler de ce qui ne vous regarde pas ?
— Nous sommes humains, donc ça nous regarde !
L’Ancien me jette une œillade assassine.
— Tais-toi, Lorenzo. Tu ne sais pas de quoi tu parles.
— Mais si ! s’écrie César en se redressant. Nous savons, Seigneur. Nous savons tout !
— César, non…
— Nous savons, poursuit-il sans prêter attention à mes supplications. Vous ne pouvez pas faire ça ! Pourquoi vouloir un massacre entre espèces alors que nous vivons en bonne intelligence, humains et Patriciens ? Rien ne vous oblige à…
Un nouveau coup s’abat sur sa tempe. César ne réplique toujours pas mais je connais bien la lueur qui s’allume dans ses prunelles… Il ne supportera pas ce traitement bien longtemps. Je sais aussi que le Prince n’attend qu’une seule chose : que nous nous rebellions, pour nous écraser, lentement mais sûrement.
On ne s’oppose pas impunément à l’un des plus anciens Patriciens, à l’un des plus puissants. César le sait aussi bien que moi ! Seulement, il a le sang chaud et la réplique facile… Je lui fais signe de ne pas lutter, pensant pouvoir m’approcher de l’Ancien dans son dos pendant ce temps et, peut-être, voler le cristal que je viens de remarquer au centre des lignes magiques. Je ne m’y connais pas beaucoup en rituels de rappel d’un Patricien plongé dans le Grand Sommeil, mais j’imagine que cette babiole doit y jouer un rôle important.
Lorsque je le saisis, l’Ancien se retourne d’un bond dans un feulement qui me prend de court.
— Repose ça tout de suite, stupido ! J’en ai besoin pour guider le Premier jusqu’ici.
C’est là que je choisis mon destin.
Me voici debout devant lui, le cristal à la main, la femme agonisante d’un côté, César de l’autre… Et je fais alors ce que je crois être le mieux pour contrecarrer définitivement le retour du Premier.
Je lance le cristal de toutes mes forces contre le sol, où il éclate en mille morceaux.
Le hurlement de rage de l’Ancien me vrille les tympans. Je le vois saisir une hache, abandonnée contre un mur, et marcher sur la femme attachée au poteau. Ses yeux révulsés se fixent sur la lame, emplis de larmes.
— Tu ne me sers plus à rien, toi.
César essaie de s’interposer, mais son mentor est bien plus fort que lui : il le saisit à la gorge d’une main, tandis que de l’autre il décapite la femme ligotée d’un seul mouvement.
Sa tête roule jusqu’à moi, les crocs s’arrêtant tout près de mon bras. Je bondis en arrière, révulsé, me remets sur mes jambes, et…
— Ce cristal était unique ! hurle l’Ancien en décochant un coup de poing à César, qui essayait de me rejoindre. Unique, vous entendez ?
Il continue à crier, en rythme avec les coups assénés à mon pauvre frère de cœur, dont la peau ne tarde pas à éclater. Le visage tuméfié, il essaie d’esquiver de son mieux mais la rage du Prince est trop forte.
— Arrêtez ! Vous allez le tuer !
— Et alors ? Ce n’est que ce qu’il mérite ! Pour qui vous prenez-vous, pauvres petites créatures sans cervelle ? C’est exactement pour cela que vous, les humains, devez disparaître ! Vous m’entendez ? Disparaître ! Votre existence seule est une insulte à notre intellect, à nous les Patriciens !
— Seigneur, tenté-je en m’approchant, les mains levées pour parer les coups éventuels. Vous nous avez toujours répété que le Premier était un être devenu monstrueux, qu’il n’était plus qu’instinct et violence…
— Tais-toi, Lorenzo.
— Vous n’auriez pu le contrôler !
— Je peux tout ! Tout ! N’as-tu pas encore compris ? Vous mériteriez des souffrances éternelles, pour ce que vous avez fait… La mort est encore trop douce, pour des imbéciles de votre espèce.
C’est là, à cet instant précis, que je mesure l’étendue de l’orgueil de l’Ancien, ainsi que celle de sa folie. Il se pense réellement aussi puissant que cela, ou bien est-ce juste l’expression d’une mégalomanie sans bornes ?
Sous mes yeux horrifiés, il se penche sur César et enfonce profondément ses crocs dans la veine de son cou.
— Non !
Je me précipite, en vain. L’Ancien se tourne vers moi, un sourire sanguinolent suspendu à ses crocs, et me saisit par le bras qu’il tord dans mon dos. César est à terre, se vidant peu à peu de son sang. Une larme coule sur sa joue.
— Mes chers petits idiots, je vous annonce que vous pouvez renoncer dès à présent à la vie éternelle. Vous ne serez jamais dignes d’être des Patriciens !
— Seigneur, je vous en prie…
— Vous allez juste mourir, comme les larves pathétiques que sont tous vos semblables. Encore une preuve, s’il en fallait une, qu’il est plus que temps de mettre fin à votre race abjecte !
Immobilisé, je ne peux me défendre lorsqu’il me mord à mon tour.
Il y a un craquement lorsque ma peau cède, puis la douleur éclate dans mes muscles, dans mes nerfs, tandis que mon sang est pompé avec force. La sensation est… J’ai imaginé mille fois ce que je ressentirai au moment de recevoir la morsure et de devenir un Patricien, toutefois rien n’aurait pu me préparer à affronter cette souffrance, cette sensation abjecte de me vider de mon fluide vital… Surtout que, je le sais, je ne m’éveillerai pas avec des crocs et un cœur mort.
Non. Cette mort sera la seule que je connaîtrai. La seule et unique.
Définitive.
Cette pensée tourne en boucle dans ma tête quand je m’effondre sur les genoux. Devant moi, César essaie de se redresser, une main sur le cou dans une vaine tentative pour contenir l’hémorragie. L’Ancien sait ce qu’il fait : il nous a mordus pour que nous mourions — que nous mourrions vite.
Il tend une main suppliante vers l’Ancien, qui s’agenouille pour recevoir ses dernières paroles à l’oreille…
J’en profite pour me traîner jusqu’à la porte.
Oui, c’est lâche.
Oui, c’est vain.
L’instinct vital des humains est pourtant si puissant que même à moitié vidé de mon sang, je cherche encore une solution pour fuir la mort, pour vivre, vivre ! Il doit y avoir un moyen, je le sais. Après tout, j’ai déjà nourri un Patricien, il suffirait qu’un Patricien me laisse boire quelques gouttes de son sang pour me sauver…
Il y avait quelqu’un, à l’étage supérieur. Un garde que César et moi avons esquivé pour descendre dans les souterrains. Je m’en souviens très bien !
Si je me précipite sur lui, si je lui dis qu’il y a eu un accident, que je l’implore de me laisser boire son sang… Si je lui dis que c’est sur ordre de l’Ancien ?
Pour vivre, je suis prêt à tout.
Pour me venger aussi.