Les amants du Vinland, tome 2/2

Romance historique — Groenland et Amérique du Nord — 1ère édition mars 2020 — Disponible en numérique et format poche.

  • Résumé
  • Tu l’as lu ?
  • Paroles de lecteurs
  • Mon petit mot
  • Prologue
L'île du Ragnarök Vinland romance historique Anna Lyra

Résumé

Leifsbúdir, Vinland, en l’an 1002. 

Par les jupons de Thor ! En voyant la flamme de fureur dans le regard de Freydis Eiriksdottir, la skjaldmö sut qu’elle avait commis une erreur. Une erreur impardonnable. Pourquoi Astrid avait-elle échoué à obéir aux ordres ? Pourquoi n’avait-elle pas pu tuer Rorik, le traître coupable de la mort de son frère, comme elle le devait ? Pour la première fois de sa vie, il semblerait qu’elle ait à choisir vers qui ira sa loyauté : Freydis, l’épouse du chef qu’elle admire, ou bien Rorik, cet homme dangereux capable de troubler ses sens et son esprit ? 

Tu l’as lu ?

Si toi aussi tu as lu ce roman, n’hésite pas à laisser ton avis sur Amazon – ainsi que sur les plateformes de lecture (de type Babelio, Livraddict, etc.) si le cœur t’en dit ! C’est ton avis qui oriente les futurs lecteurs et lectrices, et qui contribue à faire connaître le roman. D’avance, je t’en remercie !

Paroles de lecteurs

Cette fois-ci encore Anna Lyra nous transporte au Vinland dans une romance à la fois riche historiquement, plaisante à lire et aux accents parfois tragiques. D’une plume maîtrisée, l’auteur fait défiler devant nous les heures sombres des explorateurs vikings au Vinland. On y découvre aussi un beau portrait de femme, puissante et cruelle.

B. P.

Il m’a fallu environ 10 secondes pour être plongée dans l’histoire. Merveilleusement bien écrite, prenante. Le suspens parfaitement dosé. La superbe plume d’Anna Lyra, que j’ai découverte dans ce livre, m’a convaincue de lire tous ses autres livres.

Thg

Anna Lyra nous offre vraiment une romance de qualité. On sent qu’il y a eu un vrai travail de recherche derrière, je dirais même un travail d’historien. L’auteure essaie de nous immerger un maximum dans la vie de l’époque sans pour autant alourdir le texte avec des détails insignifiants. Je trouve qu’elle a vraiment bien dosé les choses.

En ce qui concerne l’histoire en elle-même, elle est plutôt surprenante et c’est quelque chose que j’apprécie. Elle ne reprend pas une trame habituelle d’une romance historique.

Ce n’est ni le premier, ni le dernier roman d’ Anna Lyra que je lis et elle a de nouveau réussi à me séduire avec un univers que je ne connais encore que trop peu mais que je demande à découvrir. Son écriture est vraiment très jolie et j’ai dévoré ce roman en peu de temps.

La Malle aux Livres

J’ai apprécié la façon dont Anna Lyra montre le malaise qui s’installe, comme si le Vinland était une entité propre qui agit sur les hommes et les femmes pour faire ressortir ce qu’il y a de pire en eux. L’atmosphère de fin du monde est bien retranscrite.

Aurore

Une fois de plus, Anna Lyra démontre sa grande maîtrise de la romance historique : elle ne sombre jamais dans le cliché ; au contraire, elle colle au plus près aux réalités de l’époque qu’elle décrit, ce qui en rend ses histoires encore plus vraies et plus prenantes.
Ce livre, par exemple… Impossible d’en décoller une fois commencé ! On est emporté par toute une pléiade d’émotions, au point d’avoir l’impression d’être dans un grand huit.

Lune d’Argent

Mon petit mot

Lorsque j’ai commencé l’écriture de ce roman, je savais déjà que ce serait le dernier que je consacrerais à la culture scandinave. Voilà pourquoi il traite du grand Ragnarök, la fin des temps de la mythologie scandinave : c’était un peu mon petit Ragnarök à moi.

Pourquoi avoir décidé d’arrêter là ?

D’une part, je considérais, en cinq romans, avoir fait le tour des principaux aspects du monde viking – et écrire la même chose, franchement, je ne peux pas. J’aime me renouveler, apprendre de nouvelles infos en faisant mes recherches. D’autre part, le thème viking redevenait à la mode et… je déteste aussi écrire sur un thème à la mode ! Oui, je suis pénible ! ^^ Mais il n’y a rien de mieux pour me couper l’inspiration que voir fleurir plein de romans sur le thème de mon projet en cours. Suffisamment de Vikings pour moi, donc… J’avais besoin de changement.

D’ailleurs, en parallèle de L’île du Ragnarök, j’ai commencé à écrire le premier opus des Ombres d’Édimbourg. 😉

Prologue

Brattahlid, Groenland, l’an 1002

Le soleil couchant nimbait d’or fondu les lambeaux de nuages effilochés par les vents, tandis que les glaces éternelles des sommets de l’est se voilaient peu à peu d’ombres pourpres. Nombreuses et avides, les langues de sel de la marée déclinante effleuraient à peine les galets de la rive, se retirant avec discrétion à l’heure des audiences privées accordées par Leif Erikson, yarl d’Eystribyggd.

Le misseri d’été1 débutait à peine, et Leif avait reçu beaucoup de fermiers d’Eystribyggd, la Terre de l’Est, dans sa maison-longue de Brattahlid. La journée s’était écoulée avec une exaspérante lenteur, entre plaintes et réclamations… C’est donc avec un geste agacé que le yarl avait tiré le rideau de laine sombre séparant la salle commune de sa pièce privée, attenante à sa chambre et réservée au seul usage de sa famille.

— Que veux-tu, Freydis ?

Si son visage trahissait la lassitude, le ton était aussi tranchant que de coutume. Sa demi-sœur ne s’en formalisa pas. Après tout, Leif et elle ne s’aimaient guère et l’un comme l’autre ne s’embarrassaient plus de courtoisie. Si Leif faisait des efforts en raison de leur lien de sang, Freydis, quant à elle, ne prenait même pas cette peine.

Elle s’installa confortablement sur un siège garni de coussins ;– celui d’Erika, l’épouse de Leif, présentement enceinte de leur deuxième enfant. Puis, elle lissa sa robe brodée avec ostentation, rajusta sa paire de fibules d’argent, secoua un peu ses poignets parés de bracelets précieux et regarda enfin Leif droit dans les yeux.

— Nous partirons avant la fin du misseri d’été. Thorvard dit que nous aurons le meilleur navire qui voyagea jamais sur la mer du Couchant.

— Le meilleur navire, vraiment ? railla Leif en se plantant devant elle, bras croisés. Ton mari sait-il que les navires partis vers le Couchant se comptent sur les doigts d’une seule main ?

Freydis haussa les épaules.

— Thorvard n’est pas bien malin, mais il s’y connaît en construction de navires. S’il dit que le navire est bon, je le crois.

— Tant mieux pour lui…

— Tu veux dire « pour nous ».

— Parce que tu comptes toujours t’embarquer avec ton mari pour le Vinland ? Franchement, ce caprice commence à devenir grotesque.

Freydis se sentit blêmir sous l’effet de l’irritation. Leif était si ambitieux ! Elle aurait voulu lui faire ravaler son arrogance et ses airs supérieurs.

Cependant, Freydis n’en ferait rien. Leif était le yarl, à présent, et elle savait rester à sa place malgré ses sempiternelles provocations.

Elle se contenta donc de ricaner en le toisant des pieds à la tête.

— Que crains-tu, mon frère ? Que je sois plus chanceuse que toi ? Que je ramène tous mes hommes à bon port, contrairement à toi ?

Le regard de glace de Leif la cloua à son siège.

— Je pense à ton enfant, et tu devrais faire de même.

— Occupe-toi plutôt des tiens, siffla Freydis en touchant machinalement son ventre encore plat, et laisse-moi vivre ma vie comme je l’entends.

— Ce n’est pas un jeu, Freydis. Tu n’es pas une skjaldmö2, tu pourrais être blessée. Voire pire. Le Vinland est une terre hospitalière mais très lointaine. Méconnue. L’homme hardi qui s’aventure vers le Couchant doit affronter mille dangers avant de l’atteindre, et une fois là-bas, le pire est encore à venir car ses habitants sont loin d’être accueillants.

— Tu as eu ta chance, Leif. Thorsteinn aussi. C’est à mon tour, maintenant !

Leif soupira profondément avant de se laisser choir sur un tabouret.

— Une femme enceinte n’a pas sa place sur les mers.

— Je ne vais pas renoncer à cette expédition, après deux ans de travail pour réunir les fonds, construire un navire, engager un équipage… Non, ça jamais ! Enfant ou pas, je partirai.

— Que veux-tu prouver, au juste ? Tu es ma sœur. Mon sang. Il ne reste que nous, maintenant, et tu n’as pas à faire quoi que ce soit pour que je considère que…

— Parce que tu t’imagines que je recherche ton approbation ? Ton affection ? Tu rêves, Leif ! Je n’ai jamais eu besoin de toi.

La mort de leur père, le redoutable Erik le Rouge, avait définitivement bousculé leur fratrie, deux ans plus tôt. Leif, l’aîné, avait pris le pouvoir à Eystribyggd en abandonnant ses projets de conquête vers le Vinland3, et avait pris pour épouse la fiancée de son cadet, Thorsteinn. De son côté, celui-ci avait épousé Gudrid, la jolie, et très jeune, veuve du naufragé sauvé par Leif au retour de son expédition. Plus rien ne comptait à ses yeux, alors, que sa jolie femme… Freydis s’était ainsi vue privée de son meilleur appui. Avant de le perdre pour de bon, quand il avait échoué à trouver le Vinland et était revenu rongé par les fièvres, lesquelles l’avaient emporté avant la lune suivante.

Quant à Thorvald, son troisième demi-frère, il n’avait pas été fichu de revenir en vie du Vinland ! Leif était rentré sans Thorvald, mais au bras de la fiancée de Thorsteinn ; et personne ne s’en était offusqué4. Thorsteinn avait bien essayé de ramener sa dépouille à Brattahlid pour l’ensevelir dignement, mais cet idiot s’était perdu en mer.

C’était à elle, Freydis, que revenait désormais cette mission,– officiellement. En réalité, elle puisait l’essentiel de sa motivation dans la promesse de s’enrichir considérablement.

Leif lui tourna le dos pour se servir un gobelet de bière. Ses cheveux lâchés sur ses épaules, d’un roux plus clair que celui de Freydis, attestaient malgré tout de leur parenté.

— Je répète ma question : que veux-tu ?

— Leifsbúdir5.

— Bien sûr, tes hommes pourront occuper les habitations du camp que j’ai bâti au Vinland.

— Tu ne m’as pas comprise, frère : je veux que tu me donnes Leifsbúdir.

Leif se retourna, incrédule.

— C’est tout ? Tu ne veux pas mes bottes et mes braies, tant que tu y es ?

Freydis serra les dents et se leva d’un bond.

—  Ce ne serait que justice ! Je ne possède rien, ici, à Eystribyggd.

— Ton mari possède pourtant une belle ferme à Gardar.

— J’ai besoin de ce campement !

— Tu as besoin de l’occuper, c’est vrai, et je t’autorise avec plaisir à t’y installer le temps de ton séjour au Vinland : tes associés et toi pourrez y vivre autant de temps que nécessaire. Mais pas question que je te le donne.

— Quoi ? Et tous tes beaux discours, alors ? Je suis ta sœur, ton sang. Il ne reste que nous… C’était du vent, n’est-ce pas ?

— Jamais je ne te donnerai un bien qui peut et doit servir à tous ceux qui souhaiteront faire halte au Vinland. Leifsbúdir ne t’appartiendra jamais, Freydis.

Elle se crispa. Depuis les tréfonds de sa mémoire, la voix de Thorsteinn résonna dans sa tête aussi bien que s’il s’était trouvé dans la pièce.

Du calme, Freydis, ne sois pas impatiente. Si tu rencontres un obstacle, contourne-le.

Par conséquent, elle puisa en elle la force d’afficher un sourire contrit.

— Très bien. Tu es le chef de famille, je me soumets donc à ta décision.

Leif tendit la main vers elle, montrant l’anneau de leur défunt père. Un vieil anneau, mais d’or pur. Relique des temps de gloire du père d’Erik le Rouge, Thorvald Ásvaldson. Erik disait toujours que ce bijou lui rappelait ses origines, et, après sa mort, Leif avait ressenti le besoin de recueillir cette relique du passé et de la porter, en son honneur.

La façon qu’il avait de brandir cet anneau sous le nez de Freydis, à ce moment, indiquait assez clairement qu’il avait pris conscience de tout le poids des responsabilités qui pesaient sur lui.

— Je suis le yarl d’Eystribyggd, Freydis, et je dois agir pour le bien de notre communauté tout entière.

— Bien entendu.

— Bon. Maintenant que les choses sont claires, j’ai moi aussi quelque chose à te demander.

Vraiment ? Freydis se pencha en avant, attentive à ce qui allait suivre.

— La recherche des restes de notre frère, Thorvald, est une noble quête. J’ai fait serment de le ramener ici pour son dernier repos, et je tiens à honorer cette promesse. Mais je souhaite que tu essaies également de retrouver une autre personne.

— Un autre de tes hommes ? Où est-il mort ?

— J’ignore s’il est mort.

Freydis haussa les sourcils. Il ne pouvait s’agir que d’une seule personne. Le seul qui n’était pas rentré, mais n’avait pas non plus été tué par les skraelingar6, c’était celui que Leif avait délibérément abandonné sur place…

— Rorik, asséna Leif. Je veux que tu retrouves Rorik. Au moins que tu découvres ce qui lui est arrivé. Et, s’il est en vie, ramène-le-moi.

Freydis frissonna. Lors du voyage de Leif, elle s’était assuré les services de Jorik, le frère aîné de Rorik, pour empêcher le retour de Leif par tous les moyens. Non seulement cet imbécile de Jorik avait échoué, mais de plus il avait été démasqué ! Leif n’avait pu, heureusement, remonter la piste jusqu’à elle qu’il croyait toujours innocente.

— J’ai été prompt à le condamner comme son frère, j’ai remis la voile sans lui en remettant son sort entre les mains des dieux… C’était certainement une erreur. Rorik devait savoir des choses sur son frère, sur ce complot, et surtout sur la personne qui voulait ma mort.

— Encore cette histoire, Leif ? Voyons, Jorik est mort, et…

— Il n’agissait pas seul. Quelqu’un complotait avec lui, peut-être même lui donnait-il des ordres car Jorik était loin d’être assez ambitieux pour échafauder un tel projet. Je veux savoir de qui il s’agit, et je l’apprendrai ! Quel qu’en soit le prix, j’aurai le fin mot de l’histoire.

Freydis sentit son cœur tambouriner dans sa poitrine mais s’appliqua à sourire de toutes ses dents.

— Fais-moi confiance, mon frère : si Rorik est en vie, je le trouverai.

1Les Scandinaves divisaient l’année en deux grandes saisons, le misseri d’été et le misseri d’hiver.

2« Guerrière au bouclier », femme combattante.

3Territoire d’Amérique du Nord découvert par Leif Erikson vers l’an 1000, correspondant à l’île de Terre-Neuve.

4Voir Le souffle de Njörd, dans la même collection.

5« Les bottes de Leif », le hameau construit par Leif Erikson au Vinland, probablement sur le site de l’Anse aux Meadows, à la pointe septentrionale de l’île canadienne de Terre-Neuve, dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador.

6« Maigrichons ». Les Vikings appelaient ainsi tous les peuples rencontrés entre le Groenland et le Vinland. Nous avons choisi, dans Le souffle de Njörd, de différencier les Beothucs et les Mi’kmaqs en les nommant respectivement rauđr skraelingar et svart skraelingar, soit « Maigrichons Rouges » et « Maigrichons Noirs ».